Le Mont Fuji-san n’est accessible (officiellement) que de début juillet à début septembre. Étant à Tokyo pendant cette période, il aurait été dommage de ne pas en profiter ! Quatre sentiers permettent d’accéder au sommet. J’ai choisi de faire, avec un ami japonais rencontré à ShigaKogen, l’ascension de nuit par le sentier Subashiri, qui est le deuxième le plus parcouru. Ce sentier a l’avantage de démarrer dans la forêt et rejoint le sentier Yoshida (le plus parcouru) sur sa fin. Côté chiffre, il y a 1700 mètres de dénivelé pour 6h de montée. Cet article sur japan guide est un bon point de départ si vous voulez plus d’informations pratiques.
L’ascension
Je prends un train depuis Shinjuku pour la gare de Gotemba. Je retrouve à la gare Yoshida et on part en voiture jusqu’au parking Subashiri. Mais on n’est pas encore arrivé à la 5ème station, départ du sentier. En effet, vu la popularité de cette montagne, des restrictions de circulation obligent à laisser son véhicule en bas et de prendre un bus pour se rendre à la station. Après 20 minutes de bus, on arrive à la 5ème station Subashiri à 2000 mètres d’altitude.
Yoshida n’étant pas un habitué des ascensions, on reste 1h à cette station afin de s’acclimater un peu. Du thé nous est gentiment offert par la propriétaire de l’un des magasins. Au début du sentier, une contribution de 1000yen par personne est demandée. En échange, on nous fournit une carte détaillée de l’itinéraire ainsi que quelques goodies. De son côté, Yoshida porte avec lui un bâton appelé kongoutsue (金剛杖) qu’il fera graver à différentes stations et temples le long du parcours.
Afin de démarrer tranquillement, on fait l’aller-retour vers le pic Kofuji qui est à la même altitude que notre point de départ. Puis on commence l’ascension proprement dite. La montée à travers la forêt est plaisante, sans difficultés, et permet d’être moins dans les nuages. Deux heures plus tard, après être sortis de la forêt, on arrive à la 6ème station (qui était fermée). On y fait une pause d’une heure environ et on ne verra qu’un autre groupe passer. Puis à mesure que le soleil descend, les différentes stations s’enchaînent. On croise peu de monde durant la montée, 2-3 personnes tous les quarts d’heure environ…
Nous sommes maintenant au-dessus des nuages, ce qui permet de profiter d’une nuit claire. Par contre, le vent commence à être de plus en plus présent et rend la progression moins agréable. Les repères nombreux et le sentier bien parcouru rendent la navigation de nuit aisée. On arrive à la 8ème station vers minuit. Le vent est fort et froid. Comme la station nous protège, nous décidons d’y rester et de partir plus tard afin d’arriver au sommet pour le lever du soleil. Vu que nous avons croisé peu de monde et que nous voyons peu de monde à la station, je me dis que la montée finale devrait être calme.
Grossière erreur ! Vers 2h du matin, les groupes dormant dans les refuges commencent à arriver (essentiellement des étrangers) et la station devient vite bien remplie. L’ascension est donc une longue colonne humaine bien visible avec ses lampes frontales. Le rythme est lent et je dois attendre Yoshida qui avance difficilement à cette altitude. Vu notre vitesse de progression, il ne fait aucun doute que le soleil sera levé avant notre arrivée au sommet. Mais heureusement le sentier permet d’admirer le lever du soleil en tout point. Ainsi, à environ 100 mètres d’altitude avant le sommet, à 4h du matin et à la faveur d’un espace offert au détour d’un virage, je m’assois, sors mon appareil photo et profite du paysage.
Je ne sais pas si cette configuration est fréquente ; en tout cas ce lever de soleil (asahi en japonais) est magnifique. En contre-bas, les randonneurs avec leurs lampes frontales donnent l’illusion d’une procession sortie des nuages, au milieu une mer de nuage continue (unkai en japonais) s’étale et au fond le soleil commence à rougir le ciel. D’autres marcheurs m’imitent en s’arrêtant également sur le côté afin de profiter de ce superbe paysage, d’autres continuent de marcher en lui tournant le dos. Je discute un peu avec les gens autour de moi ; des touristes venus de Hong-Kong ou de Singapour, un britannique souffrant du mal des montagnes.
Après cet épisode, je retrouve Yoshida qui s’était arrêté comme moi quelques lacets plus bas. La foule s’étant dispersée, l’ascension devient plus plaisante. Motivé par la proximité du sommet, je laisse Yoshida grimper à son rythme et je fais les derniers virages au pas de course. Il est 5h du matin et je passe enfin le tori ! J’en profite pour battre mon record personnel d’altitude qui était de 3400m dans les Alpes franco-italiennes.
Au sommet, Yoshida s’arrête aux 2 sanctuaires afin de faire graver son bâton, de prier et de récupérer quelques documents religieux. On s’arrête également au bureau de poste afin de récupérer des cartes postales et d’en poster quelques unes. Le vent souffle fort au sommet et transporte régulièrement des poussières volcaniques, ce qui ne donne pas particulièrement envie de s’y attarder. On entame la descente vers 9h du matin. Descente qui se résume à marcher sur des chemins de graviers volcaniques, utilisés par des bulldozers aménagés qui ravitaillent les différentes stations matériellement et humainement. La météo est superbe et nous offre un ciel bleu très légèrement voilé.
Cette descente est assez monotone et ayant l’habitude de marcher rapidement dans les descentes, je dois attendre régulièrement Yoshida aux différentes stations. Vers 2500 mètres, on retrouve les nuages, ce qui évite de subir les rayons du soleil. Je croise plusieurs groupes de militaires des forces d’auto-défense. Un centre universitaire de formation étant proche, ils ont l’habitude de venir aussi pour leurs entrainements. Puis après une traversée de la forêt, nous voici de retour à la 5ème station. Une glace au macha et un trajet en bus plus tard, nous voici de retour au parking.
Mon avis
Je suis très satisfait d’avoir cette ascension. Même si elle ne présente pas un intérêt montagneux particulier (faible pente, un seul sommet), elle a le mérite d’être facile d’accès et permet de randonner de nuit aisément à des altitudes élevées. Le lever de soleil au-dessus des nuages est grandiose et vaut à lui tout seul la montée. Pour Yoshida cette ascension est aussi un pèlerinage religieux et après avoir posé la question à des japonais autour de moi, c’est un sentiment globalement partagé. Bref, si vous avez envie de faire un sommet à 3770m sans vous prendre la tête, c’est un très bon choix. Et je pense que c’est à faire au moins une fois quand on vit dans la région. Mais comme m’a dit Yoshida, seuls les fous le font plusieurs fois ;)
Épilogue
On avait prévu initialement d’aller à un onsen pour finir la journée en beauté. Mais vu l’heure tardive, ce sera direction Atami afin de profiter de la salle de bain(et surtout de sa baignoire chaude) de l’appartement où on avait logé avec Yoshida et des amis français. Puis, retour sur Tokyo en train et repos bien mérité afin de récupérer de la nuit blanche !
Équipement
Pour information, voici l’équipement que j’avais pour cette ascension :
- 1 sac à dos de 35L
- 2 t-shirts
- 1 polaire synthétique coupe-vent
- 1 imperméable
- 1 paire de gants + 1 bonnet
- 1 pantalon de randonnée mi-saison
- 2 paires de chaussettes fines
- 1 paire de chaussure basse de trail
- casquette/bandana, lunettes de soleil, crème solaire
- lampe frontale avec ses piles, sifflet, téléphone chargé
- trousse de secours : 4 dosettes de désinfectant, 4 sérum physiologiques, 2 compresses, 4 pansements, 4 compeed, 4g de doliprane, spray anti-moustique
- 4L d’eau, des sachets de noisettes/amandes/cacahuètes, des raisins secs, des barres chocolatées
- appareil photo, trépied
Quelques remarques :
- Mon pantalon n’étant pas coupe-vent, j’ai eu bien froid aux jambes la nuit. Je préconise soit un meilleur pantalon, soit de rajouter des collants à la liste.
- Beaucoup de gravier sur le sentier, donc les semelles vont souffrir. Yoshida avait une paire de guêtres. Cela lui a évité des cailloux dans les chaussures lors de la descente.
- Vu qu’il y a beaucoup de poussière sur les chemins de descente, un masque pour le visage permet d’éviter d’en avoir plein le nez et la bouche.
- La pente étant modérée, je ne pense pas que des bâtons soient utiles